La Repasseuse (ar ferourez ou ampezourez)

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(© Y.-R Caoudal)
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Michel Bolzer, repasseur
(© JL Guégaden)

Être une bonne repasseuse nécessitait une longue pratique et un bon professeur. C'est pourquoi les secrets du repassage se transmettaient généralement de mère en fille : Les astuces de lavage, la recette de l'amidon, le coup de patte au fer... et la clientèle !

Chaque Bigoudène avait "sa" repasseuse attitrée et/ou préférée : Soit qu'elle préféra le bleuté de son lavage, sa perfection dans le repassage ou plus simplement sa proximité ou son degré de parenté.
Ce qui importait au bout du compte, c'était d'avoir bonne allure...


Les repasseuses travaillaient chez elles. Elles n'avaient pas pignon sur rue : C'étaient des artisanes. Des artisanes dont l'activité ne leur permettait pas de vivre : Elles ne pouvaient satisfaire qu'une clientèle locale qui n'avait pas les moyens et la possibilité de se déplacer. Elles avaient donc une autre activité qui consistait à s'occuper de leur petite ferme, à travailler en friterie, en conserverie ou comme journalière agricole...

Le métier de repasseuse était florissant, car pratiquement toutes les femmes portaient la coiffe. Et tous les jours : Pas question de sortir sans elle. Il fallait rester "présentable" . Question d'honneur personnel et de respect pour ceux que l'on rencontrait. Au pire ne portait-on que le vouloutenn pour aller aux champs ou retourner le tail (goëmon) sur la grève ! 

Ainsi, chaque femme "du commun" avait plusieurs coiffes : Coiffes de tous les jours, coiffes un peu passées pour les travaux aux champs ou à l'usine, coiffe(s) de cérémonie et une coiffe de deuil, au cas où...
Les commerçantes, elles, en possédaient plusieurs dizaines. Il leur fallait être "toujours propre sur elle" pour le prestige de leur établissement, de leur famille et par respect  pour la  clientèle.
Les riches paysannes était elles aussi de bonnes clientes pour les brodeuses de coiffes.

Chaque coiffe était lavée/repassée au moins une fois par an. C'est dire s'il y avait des coiffes à repasser !
Le grand repassage annuel s'effectuait à la fin de l'hiver aux mois les plus secs quand les repassages des coiffes amidonnées étaient plus facile à sécher.
Seules les coiffes et leurs dalets étaient repassés-amidonnés après lavage. Les lacet étaient seulement repassés : Allez faire des noeuds avec un tissus amidonné et cassant !

La profession déclina en Pays Bigouden à partir des années 50 en même temps que la coiffe tombait en désuétude : On s'habillait de plus en plus giz kêr (mode de la ville) au détriment du giz bigoudenn


LE LAVAGE :                                                                                                                                                                                     

La première étape consiste à laver les coiffes, leurs dalets et lacets.

On laisse d'abord détremper les coiffes dans de l'eau claire afin de dissoudre la majeure partie de l'amidon en remuant pour accélérer le phénomène. On voit que l'amidon est sorti... à la couleur de l'eau !
Ensuite, il faut rincer à l'eau claire.
On fait ensuite bouillir coiffes, dalets et  lacets en ajoutant à l'eau claire un peu de lessive pour linge délicat afin d'éliminer la saleté. Tout cela avec délicatesse, bien sûr !
Puis, on rince à l'eau claire jusqu'à ce que l'eau de rinçage devienne claire elle aussi.
Pour finir, il faut tremper coiffes, dalets et  lacets dans un même bain contenant quelques gouttes de bleu à blanchir afin que tous les composants de la coiffe soient de la même blancheur. On roule délicatement en boule les dentelles au creux de la main avant de les presser, ceci pour répartir l'eau bleutée de façon uniforme dans les tissus. 


LE SECHAGE :                                                                                                                                                                                 

La deuxième étape consiste à sécher les coiffes, leurs dalets et lacets.

Les coiffes, dalets et  lacets sont donc ensuite mis à sécher au soleil dans un endroit à l'abri du vent. (Le séchage au soleil active le blanchiment des dentelles.) A cet effet, ils seront étendus sur un fil non métallique (gare à la rouille) avec des pinces à linge propres et dépourvues de rouille elles aussi.   


LE REPASSAGE :                                                                                                                                                                             

La troisième étape consiste à amidonner-repasser  les coiffes, leurs dalets et lacets.


MATERIEL :

  • Un fer à repasser (Pas à vapeur !) et sa table.
  • De la cire d'abeille.
  • Un chiffon imprégné de cire.
  • Linge blanc pour se protéger de la table.
  • Un bol d'eau pour humecter et laver ses mains.
  • Une serviette pour les essuyer.
  • Une préparation d'amidon * .

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  * Les recettes de l'amidon différaient suivant les régions de France ou leurs différents types de coiffes. En effet, certaines envolées de coiffes nécessitaient un amidon robuste alors que d'autres en méritaient un plus souple ou plus "léger". Pour chaque type de coiffe, il existait autant de variantes de ces recettes de base que de repasseuses : Chacune avait sa recette secrète qu'elle ne communiquait qu'à sa fille ou sa "successeuse".

Traditionnellement, l'amidon de blé était le plus utilisé dans le pays Bigouden. Mais il n'était pas rare de rencontrer des recettes en tout ou partie composées d'amidons de riz ou de maïs.


Voici une recette d'amidon gentiment communiquée par le passeur de mémoire et de traditions qu'est Michel BOLTZER

Recette


LE REPASSAGE EN 33 IMAGES :


Tout d'abord, je ne saurais que trop vous recommander de ne pas faire d'amidonnage de coiffe par vous même.


Avant





Le risque, c'est ça :
Après

En effet, ce travail  est affaire de professionnels ou d'amateurs éclairés comme Michel. Il faut bien garder à l'esprit qu'il est bien plus facile pour un béotien de brunir irrémédiablement un coûteux chef d'oeuvre de la broderie Bigoudène ... que de le mettre en valeur par un repassage parfait !

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Une séance de repassage de Michel ...


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Avant de commencer le travail, une petite inspection de la coiffe s'impose...
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Une petite lichée d'amidon est apposée sur la coiffe afin de lui faire pénétrer la dentelle.
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La coiffe doit être manipulée plusieurs fois afin qu'elle soit  imprégnée en totalité.

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Une dernière petite touche et voilà, l'amidonnage est terminé.
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La coiffe est mise en boule et compressée afin d'harmoni- ser l'imprégnation dans la totalité de la broderie. 
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Il faut ensuite redéployer la coiffe et contrôler l'absence de grumeaux.

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La coiffe est étalée sur un linge sec. Un coup de fer est donné sur un chiffon imprégné de cire d'abeille (le Pliz à l'ancienne)

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Un petit peu de "blak" ne peut pas faire de mal, surtout à un Bigouden !
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La propreté de la semelle doit être parfaite... 

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Gast !!! Elle est chaude comme il faut ...
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On commence le repassage sur l'endroit de la coiffe et à partir du bas. Le plissé est tourné vers le repasseur, non vers la table. 
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Les coins du bas des ailes doivent être plus bas que le bas de la coiffe et décrire un arc de cercle..

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Il faut souvent cirer la semelle. Et souvent humecter et essuyer ses mains : L'amidon, ça colle... et on risque d'en mettre partout sur la coiffe !
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Le repassage se poursuit. Après "cuisson", il est très important que l'aspect de la coiffe soit glacé.
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Régulièrement, la coiffe doit être détachée du linge. C'est la "cuisson" de l'amidon qui créée cette adhérence entre linge et coiffe.

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Un petit coup de fer "ciré" vient sécher le linge et y déposer un peu de cire "anti-adhérence".


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On reprend le repassage...
Encore et encore...  
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Un repassage d'une coiffe de deuil peut prendre 20 mn alors que celui d'une coiffe de cérémonie peut bien prendre 45mn !

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On s'approche du haut de la coiffe...
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Il est important, à ce stade, de se souvenir que le plissé est tourné côté endroit de la coiffe et qu'il faut le retourner avant que le haut ne devienne cassant du fait de la cuisson...
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Après retournement du plissé, on étale la coiffe côté endroit vers la table. On passe alors un bon coup de fer sur l'envers déjà cuit.

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Un petit coup d'oeil sur la tenue avant de poursuivre...
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On attaque maintenant le haut de la coiffe et le plissé.
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Il est important de savoir souvent "pauser" pour éviter tout guingois dans le haut de coiffe.

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Les ailes et le plissé commencent à durcir... C'est presque fini. 
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On voit bien ici la forme donnée à la coiffe par l'amidonnage.
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Derniers coups de fer...

Le travail est satisfaisant.
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Un dernier petit coup de fer sur l'endroit.
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Allez, encore un...

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Afin de pouvoir positionner plus harmonieusement les lacets sur le sommet de la coiffe, les hauts des ailes sont affectés d'un pli.
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Pour celà, il est nécessaire d'humecter ses doigts afin de ramollir la dentelle et d'éviter toute cassure.
Et voilà le travail !



Merci à Michel de nous faire partager sa passion, avec la gentillesse, le "blak" et la compétence qui sont les siens...





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